Un trailer, c'est parfois tout ce qu'il me faut pour dénicher un jeu à fort potentiel. Et une fois entre les mains, quand l'essai se transforme en 4/5, c'est toujours un plaisir. Vous savez quoi ? J'écris ce test pour en être débarrassé, mais je n'ai qu'une envie, c'est de relancer Expeditions : Conquistador, un RPG/gestion/stratégie bourré de bonnes idées.
Nostalgiques de Jagged Alliance, amateurs de Heroes of M&M, fans de XCOM, passionnés de Pirates!, écoutez-moi ! N'en avez-vous pas assez de vous lamenter ? D'attendre des suites et des remakes passivement ? De vivre votre quotidien terne de joueur RPG/Stratégie tour par tour ? Prenez vos vies en main, compagnons ! Un nouveau monde nous ouvre les bras, un monde d'opportunités ! Un monde d'événements scénarisés, de complots politiques, de combats en 6 vs 6 sur des hexagones. Serez-vous un leader curieux, tolérant, pacifique ? Où allez-vous conquérir ces terres au nom du saint Gaming ? Joignez-vous à moi dans ma quête de nouveaux horizons ludiques et vous en reviendrez plus riches. Je lance une expédition. Une expédition... Conquistador !
Esteban, Tao, Zia...
Tout commence en Espagne début du XVIe siècle, alors que votre empire est encore l'allié des Aztecs et que toutes les richesses de l'Amérique du Sud restent à piller. Fils de noble, vous partez avec une dizaine de mercenaires parmi une liste de postulants. Ils ont tous un nom, une histoire, une personnalité, une profession. Trois traits les définissent : ils peuvent être pieux ou ouvert d'esprits, agressifs ou prudents, altruistes ou matérialistes, etc. D'autres compagnons se joindront à votre compagnie par la suite. Et pour garder tout le monde content, il vaut mieux s'entourer gens ayant la même optique que vous, car leur moral baissera si vous actes vont à l'encontre de leurs propres vues, jusqu'à peut être se mutiner.
Si tu cherches le trouble...
Le moral n'est pas trop difficile à manipuler si vous avez un fort Leadership. Il s'agit d'une de vos caractéristiques de base. Les autres influent sur vos capacités à gérer vos ressources (rations, médecine, mouvement...), ainsi que sur les dialogues ou les combats, qui sont TOUS scénarisés (tactique ou diplomatie). Il n'y aucune rencontre aléatoire dans Expeditions : Conquistador : que l'on pénètre dans un temple mystérieux, que l'on aborde un village tribal, que l'on croise une patrouille sur la route, tout donne lieu à des choix. Même si le parti opposé est très agressif et que le combat est inévitable, vous aurez toujours des options tactiques (un test de compétence est effectué) pour tourner les choses à votre avantage. Sinon la diplomatie ou la corruption se montreront utiles pour les non-violents. En tout cas, le jeu ne manque pas d'histoires à raconter.
Que le pillage commence
Tout commence dans un avant-poste sur une île. Le gouverneur du coin semble vouloir profiter de votre passage pour régler de nombreux problèmes locaux, avant de vous laisser partir sur le continent : tribus païennes inquiétantes, activités rebelles en recrudescence, etc. C'est là qu'on apprend le dur métier de conquistador. Avec un certain nombre de points de mouvement par jour, vous allez explorer et cartographier un terrain qui se présente un peu comme dans un Heroes of Might & Magic. Un peu partout, vous pourrez ramasser des bonus divers : élément d'artisanat (bois, métal, huile...), viande de sanglier, herbes médicinales ou même des trésors. Une fois les déplacements terminés, il faut camper pour les renouveler.
Chansons autour du feu
Le campement est l'occasion pour les érudits de fabriquer des objets (pièges en tout genre) ou d'améliorer de manière importante quelques aspects de votre expédition. Ainsi, des tentes plus confortables donneront un bonus au moral, ce qui n'est pas négligeable si votre leadership est bas. Quant à l'optimisation des chariots pour rajouter des points de mouvement, c'est essentiel. Les chasseurs s'occuperont de rapporter à manger, cela évite de piocher dans les stocks. D'ailleurs si vous avez trop de viande après avoir croisé un sanglier, ils peuvent aussi la conditionner en rations, sinon elle est perdue. Forcément, avec ce travail, ils n'iront pas à la chasse. Pendant ce temps, les scouts seront les plus à même de patrouiller le secteur pour ramener des ressources supplémentaires au petit bonheur des rencontres. Ils peuvent être accompagnés des soigneurs qui ne font rien quand il n'y a pas d'herbes à transformer en médecine, ou de blessures à recoudre. Enfin, les soldats assureront la garde du campement, ce qui n'empêchera pas quelques vols dans les stocks de temps en temps.
La cérémonie du coucher
Avec quelques options de campement automatiques et d'auto-assignation, ces "fins de tour" ne sont pas trop répétitives. Un peu, mais on s'en accommode. On peut même s'investir à fond de temps en temps pour adapter les ordres de chacun au terrain, car jungle, route, montagne, marais, ou encore plaine offrent des niveaux de difficulté différents en patrouille/garde/chasse. L'optimisation paye. C'est aussi là que vous écouterez les histoires de vos compagnons quand leur background fera surface. Ou que vous lutterez pour remettre sur pied la moitié de votre escouade avec un seul médecin. Souvenirs, souvenirs... L'interface aurait pu être un peu mieux pour gérer tout cela, mais au final, en quelques clics et sauf complications, le lendemain arrive bien assez tôt.
La civilisation à coups de mousquet
Une journée qui ne manquera pas d'apporter son lot d'aventure, assurément, dont des affrontements sanglants. Ceux-ci se règlent en général à 6 contre 6, bien que les choix précédant l'action et les situations scénarisées peuvent changer la donne. Vous choisissez donc votre escouade, souvent composée des mêmes mercenaires : ceux que vous aurez promus en dépensant des points d'expérience (ce qui leur apporte des bonus passifs, des traits et des compétences actives), et que vous aurez boostés avec des points d'équipement rares et précieux. Les soldats s'apparentent aux tanks de n'importe quel jeu : ils frappent assez fort, mais peuvent aussi protéger leurs camarades. Les scouts font le plus de dégâts et aident au positionnement grâce à leur furtivité. Il est immensément important de prendre les adversaires en tenaille. Les chasseurs s'occupent des cibles à distance. Les soigneurs peuvent combattre, mais ils serviront surtout à redonner de la vie aux autres. Enfin, il ne faut pas sous-estimer les érudits, qui peuvent apporter de bons bonus à vos troupes, et même déstabiliser violemment tous les ennemis à haut niveau.
La vraie vie
Personnellement, mon escouade favorite est composée de deux soldats, un archer, un scout, un médecin et un érudit. Expeditions : Conquistador n'est pas si difficile que cela au final. En fait, je me suis pris raclée sur raclée sur l'île de départ, mais c'était suite à de mauvais choix, un score minable en tactique et une inexpérience totale du système de jeu. Une fois sur le continent, où je suis arrivé bien déprimé, j'ai arrêté de faire n'importe quoi et tout s'est bien mieux passé. Il faut comprendre que personne ne meurt au combat dans ce titre. Si tous vos mercenaires sont incapacités, ou si vous sonnez la retraite, vous avez perdu. Mais rappelez-vous de la scénarisation : chaque affrontement crée un embranchement dans l'histoire si vous le gagnez ou si vous le perdez. Pas question de recommencer, surtout en mode Iron Man que je recommande vivement. Vous vivez avec vos erreurs, et vos mercenaires aussi, sauf si vous ne parvenez pas à les soigner. Dans ce cas, leurs blessures peuvent s'aggraver et ils finissent par décéder (ça ne m'est jamais arrivé, mais j'ai eu des sueurs froides). Certes, ça demande un peu de "suspension of disbelief" de ne sortir qu'avec des éclopés de combats très sérieux, mais on peut se contenter de l'explication contextuelle offerte à chaque fois.
Cette manière de façonner votre histoire, non seulement avec des choix importants dans une longue série d'événements principaux et secondaires, mais aussi à travers vos victoires et vos échecs, constitue la grosse originalité qui fait tout le charme d'Expeditions : Conquistador. On notera que les options tactiques sur le terrain restent trop limitées, que l'IA ne fait pas de miracles, que le titre ne brille pas par sa réalisation... (Il n'est pas désagréable non plus. Les illustrations sont très belles. En revanche, le moteur affiche des graphismes trop sombres : on a l'impression de voyager tout le temps de nuit, c'est pesant à force). Mais ces défauts sont facilement contre balancés par... l'Aventure. Avec un grand A.